Anna Przybysławska est une jeune femme en situation de handicap qui vit dans la communauté de L’Arche à Wroclaw, en Pologne. Dans cet article, Anna nous raconte à quoi ressemble la vie communautaire et ce que veut dire vivre en situation de handicap en Pologne et défendre ses droits, elle nous parle aussi de l’importance de la solidarité et des ponts à construire. 

« Nous voulons être actifs et engagés, nous voulons apporter quelque chose au monde, et nous pouvons le faire si nous sommes soutenus. Mais ce soutien ne doit pas limiter notre indépendance et notre dignité. »  

En Pologne, les personnes en situation de handicap sont souvent exclues de la société, et on attend d’elles qu’elles restent chez elles – mais ce n’est pas le cas dans la communauté de L’Arche à Wroclaw. La communauté comprend des personnes en situation de handicap intellectuel et des assistants qui n’ont pas de handicap. Nous partageons la vie quotidienne tous ensemble.  

Il y a trois foyers dans notre communauté. J’habite avec deux autres femmes dans un appartement. Ensemble nous prenons soin de notre appartement et avons des tâches domestiques, comme le ménage et la cuisine. Nous apprenons à devenir plus autonomes, avec le soutien d’assistants quand il y a des situations plus compliquées. 

Dans la communauté de Wroclaw, nous avons tous des activités en dehors des foyers. Beaucoup de personnes de ma communauté se rendent au centre d’activités de jour en dehors de la communauté, où elles acquièrent des compétences pratiques et sociales, d’autres vont dans un atelier de la communauté, où elles confectionnent de très beaux produits d’artisanat. Certains parmi nous sont salariés, et d’autres font du bénévolat. 

J’ai fait du bénévolat dans une bibliothèque, et actuellement je cherche d’autres opportunités dans ma ville. C’est important pour une personne avec un handicap d’avoir un travail ou une activité qui ait du sens, parce que cela favorise le sentiment de confiance en soi et l’autonomie.  

Peu d’employeurs sont prêts à embaucher des personnes en situation de handicap, parce qu’il y a tant de stéréotypes négatifs contre nous. C’est un cliché de dire que les personnes en situation de handicap sont passives et n’ont rien à offrir – ce n’est pas vrai. Nous voulons être actifs et engagés, nous voulons apporter quelque chose au monde, et nous pouvons le faire si nous sommes soutenus. Mais ce soutien ne doit pas limiter notre indépendance et notre dignité. 

« C’est important que les gens puissent nous rencontrer, et nous voir et voir que nous sommes bien plus que notre handicap : nous sommes des êtres humains comme eux. » 

Nous sommes tous des êtres humains, et nous voulons – et nous en avons le droit – être respectés. Je veux que les gens se rappellent que les personnes en situation de handicap doivent être traitées sérieusement – nous sommes des hommes et des femmes qui ont besoin qu’on les prenne au sérieux et qui ont droit au respect. 

Le problème, c’est souvent que les personnes qui ne sont pas en situation de handicap ne connaissent pas grand-chose au handicap. Notre communauté essaie de changer cela en travaillant avec des enfants, des étudiants et des adultes pour leur apprendre ce que c’est que de vivre avec un handicap intellectuel. Arrêter les préjugés, et changer la façon dont la société traite les personnes en situation de handicap, c’est une mission importante.  

C’est important de partager notre expérience avec des personnes qui ne connaissent pas grand-chose au handicap. Je suis souvent invitée à des conférences, des rencontres et des groupes de travail où j’interviens comme représentante des personnes en situation de handicap. Une fois, j’ai parlé à la radio de l’importance d’être bienveillants les uns avec les autres. Je parle aussi aux groupes locaux, dans les écoles et les églises, de la vie dans notre communauté de L’Arche. 

Tout au long de l’année, il y a des journées spécifiques qui célèbrent les personnes en situation de handicap : la Journée européenne de la vie indépendante (le 5 mai), la Journée internationale des personnes handicapées (le 3 décembre), la Journée mondiale de la Trisomie 21 (le 21 mars). Nous pouvons utiliser ces dates comme une occasion d’organiser des événements où les gens peuvent venir, faire de nouvelles rencontres, apprendre davantage de choses [sur le handicap] et apprendre à ne pas avoir de préjugés sur les personnes en situation de handicap. 

C’est important que les personnes qui ne sont pas en situation de handicap puissent nous rencontrer, et nous voir et voir que nous sommes bien plus que notre handicap : nous sommes des êtres humains comme eux. En nous rencontrant, nous nous rapprochons les uns des autres. 

« Je crois que nous avons tous besoin les uns des autres et nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. Si nous travaillons tous ensemble, nous pouvons faire de bonnes choses et être acteurs de changement. » 

Je me souviens de la vie en Pologne pour les personnes en situation de handicap il y a 30-35 ans, et je peux voir les progrès que nous avons faits. Il y a tellement de choses positives qui ont été accomplies grâce aux efforts des personnes en situation de handicap et de leurs défenseurs, mais en même temps, il y a encore tellement de travail à faire pour améliorer la situation pour tout le monde.  

Dans bien des cas, les personnes en situation de handicap et leurs familles sont abandonnées et sans soutien. A cause du manque de soutien, les personnes en situation de handicap sont souvent exclues de la société, comme je l’ai déjà dit. Nous avons besoin de plus d’argent pour financer plus de programmes comme les centres d’accueil de jour, et plus de soutien de la part du gouvernement pour les personnes en situation de handicap. 

Les sociétés ont le devoir moral de prendre soin de leurs membres les plus vulnérables. Nous avons besoin du soutien et de la bonne volonté des politiciens, des conseils locaux et du gouvernement pour aider les personnes en situation de handicap. J’en appelle à la solidarité sociale pour cela.  

Pour améliorer la situation des personnes en situation de handicap en Pologne, nous devons rendre l’espace public et l’information plus accessibles, changer les états d’esprit, et créer de bonnes politiques gouvernementales. Comme je l’ai dit plus tôt, nous avons besoin du soutien et de la bonne volonté de tous. 

Nous avons besoin de plus de gens qui veulent construire des ponts entre les personnes qui sont en situation de handicap et celles qui ne le sont pas. Je crois que nous avons tous besoin les uns des autres et nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres. Si nous travaillons tous ensemble, nous pouvons faire de bonnes choses et être acteurs de changement.